Le texte sur le “Covid-long”présenté à l’Assemblée Nationale a été adopté le 17 février afin de “redoubler les efforts pour mieux connaître, comprendre et traiter cette maladie” et ses “complications à long terme”. Avec ce vote, l’Assemblée nationale invite ainsi le gouvernement à intensifier la recherche et à travailler avec les autorités sanitaires et scientifiques en vue d’élaborer un “parcours de soins adapté” pour les “personnes souffrant de complications persistantes”.
Quelques jours auparavant, la Haute Autorité de Santé avait publié des Réponses rapides pour aider les professionnels de santé à identifier et prendre en charge ces patients . En effet, plusieurs semaines après la maladie, un nombre important de personnes infectées par le SARS-CoV-2 présentent encore des symptômes.
Faisons le point sur cette maladie encore méconnue et souvent mal comprise par les professionnels de santé qui induit pourtant une véritable souffrance et une errance diagnostique chez les patients.
Qu’est ce que le “Covid long” ?
Dès la fin de la première vague épidémique en mai 2020, la persistance de symptômes plusieurs semaines ou mois après les premières manifestations, a été décrite chez plus de 20 % des patients après 5 semaines et plus et chez plus de 10 % des patients après 3 mois et ce parfois chez des patients qui ont eu des symptômes bénins et n’ont pas été hospitalisés.
Le caractère polysymptomatologique et fluctuant de ces manifestations cliniques génère des interrogations et des inquiétudes pour les patients et les cliniciens.
L’histoire naturelle de cette maladie n’est pas connue. Les données évolutives sont encore rares et les mécanismes physiopathologiques sont au stade d’hypothèses. Le terme « COVID-long » a été utilisé par les patients puis repris dans la littérature pour qualifier ce phénomène.
La Haute Autorité de Santé précise que 3 critères permettent de repérer les patients souffrant de symptômes prolongés du Covid-19 :
- ils ont présenté une forme symptomatique de Covid-19,
- ils présentent un ou plusieurs symptômes initiaux, 4 semaines après le début de la maladie
- aucun de ces symptômes ne peut être expliqué par un autre diagnostic.
Quels sont les symptômes des patients ?
Les symptômes les plus fréquemment rencontrés sont :
- une fatigue,
- des troubles neurologiques (cognitifs, sensoriels, céphalées),
- des troubles cardio-thoraciques (douleurs et oppressions thoraciques, tachycardie, dyspnée, toux)
- des troubles de l’odorat et du goût.
- des douleurs, des troubles digestifs et cutanés sont également fréquents.
Ces symptômes peuvent évoluer de façon fluctuante sur plusieurs semaines ou mois. L’évolution observée fait alterner des phases d’exacerbations et de récupérations. Elle se fait en règle générale vers une amélioration à un rythme variable selon les patients.
Dans la mesure où la plupart de ces symptômes sont non spécifiques, la HAS insiste sur le fait qu’il faut d’abord éliminer une complication de la phase aigüe, une décompensation de comorbidité et une autre cause que la Covid-19.
Quels sont les rôles des kinésithérapeutes ?
La HAS insiste sur le fait que l’écoute doit être empathique et précise qu’il faut explorer le patient dans sa globalité. La stratégie thérapeutique doit être personnalisée et centrée sur la personne en l’accompagnant. Il faut inciter les patients à apprendre à s’autogérer, connaître leurs limites mais continuer à avoir des activités physiques même modérées (en l’absence de contre-indications).
Elle note également que l’exploration de troubles anxieux et dépressifs, de troubles fonctionnels et la proposition d’un soutien psychologique sont à envisager à toutes les étapes du suivi.
Enfin, la HAS estime que la rééducation doit avoir une place centrale : rééducation respiratoire en cas de syndrome d’hyperventilation et réentrainement à l’effort qui doit être mené de façon progressive et adaptée aux possibilités de chaque patient.
La rééducation respiratoire
A l’issue de son bilan diagnostic kinésithérapique, le kinésithérapeute conviendra de la conduite thérapeutique adaptée et individualisée à chaque patient.
Le kinésithérapeute doit être formé à la rééducation du syndrome d’hyperventilation.
La rééducation est basée sur une observation méthodique de la respiration (fréquemment thoracique haute) et une attention bienveillante des affects. Elle fait appel à la conscientisation de la respiration et repose sur le contrôle ventilatoire au cours de diverses situations (au repos, à l’effort en résistance et en endurance) vécues de manière positive.
Elle comprend :
- des exercices respiratoires à différents volumes, débits et pressions, des apnées, avec guidage par le kinésithérapeute,
- une sensibilisation à la ventilation abdomino-diaphragmatique,
- ainsi qu’éventuellement thoracique haute et basse en fonction de la clinique.
Les techniques de relaxation ou de sophrologie pourraient avoir un intérêt.
La rééducation encourage également la pratique des exercices respiratoires à domicile (auto-rééducation, environ 15 minutes par jour) et une transposition de la gestuelle respiratoire au quotidien.
L’efficacité de la prise en charge s’observe par l’amélioration de la symptomatologie et du quotidien des patients : baisse de la dyspnée, de la fréquence respiratoire, reprise de l’activité physique, amélioration de l’hypocapnie et de la qualité de vie.
Fiche Kinésithérapie -Syndrome d’hyperventilation au cours des symptômes prolongés de la Covid-19
Le réentraînement à l’effort
Lors de l’entretien initial, le kinésithérapeute détermine les évaluations dont il a besoin dans cette liste pour organiser son diagnostic :
- Évaluation des capacités aérobie,
- Évaluation des capacités anaérobies,
- Évaluation des douleurs,
- Évaluation de la fatigue, de la fatigabilité,
- Évaluations fonctionnelles,
- Évaluations des compétences des patients, de leurs motivations,
- Évaluation de la qualité de vie,
- Évaluation des capacités de proprioception et équilibre,
- Évaluation de la motricité globale en lien avec d’éventuels troubles neurologiques,
- Évaluations articulaires (déficits d’amplitude, douleurs au mouvement),
- Évaluation respiratoire,
- Recherche de trouble de déglutition, évaluation de la déglutition (patient post réanimation et/ou âgé et/ou avec antécédent de lésion neurologique centrale),
- Identification d’une éventuelle perte de poids en lien avec anosmie, agueusie et/ou trouble de déglutition.
L’évaluation initiale (et les évaluations intermédiaires) permet d’adapter le programme de rééducation au plus près des besoins, des attentes et des progrès des patients.La reprise d’une activité physique quotidienne doit être favorisée, conduite de façon progressive et adaptée aux capacités du patient et aux seuils d’effort déclenchant les symptômes. Ce réentraînement à l’effort est conduit par un kinésithérapeute formé.
Quels contenus pour les séances de réadaptation à l’effort ?
Au minimum :
- Réentraînement aérobie (ergocycle, tapis de marche…),
- Réentraînement de la force des muscles des membres et du tronc (banc de musculation à charges guidées, poids et haltères, élastiques…).
En fonction des résultats du bilan diagnostic kinésithérapique :
- Réentrainement des muscles respiratoires (valves résistées en pression),
- Réentraînement de l’équilibre,
- Retour au sport antérieur, réintégration du geste sportif,
- Et/ou orientation et adaptation en structure sport santé,
- Notion de pérennisation de l’activité physique et sportive.
Fiche Kinésithérapie-Réentrainement à l’effort au cours des symptômes prolongés de la Covid-19
À noter : La Haute Autorité de Santé ne recommande pas les régimes alimentaires d’exclusion, les vitamines et suppléments en vente libre, inutiles et potentiellement nocifs en automédication. Elle ne recommande pas davantage les approches de médecine alternative (acupuncture, auriculothérapie, ostéopathie…), qui n’ont pas été évaluées dans ce contexte. Elle invite également les professionnels de santé à éviter les examens non pertinents.